Retrouvailles de deux Mechanical Humans... [PV Josh]

Joshua avait fini les cours il y avait une heure environ. Il avait terminé par de la littérature, sa matière préférée. Les histoires étaient vraiment ce qu’il aimait le plus, et il aurait pu passer des heures à entendre raconter les livres et leur signification. En cours, il ne faisait guère attention aux élèves, et paraissait indélébile aux remarques qu’ils chuchotaient à son passage. Julian les avait mis en garde, qu’en allait à l’université, les Mechanical Human seraient aussitôt fichés comme personnes « étranges », et, comme la plupart du temps, il ne s’était pas trompé. Comme si il se dégageait de Joshua et des autres, une espèce d’aura sur laquelle il était gravé en lettres brillantes « Différent ». D’autant plus, qu’hormis certains élèves qui aimaient particulièrement s’en prendre à eux par leurs remarques belliqueuses, Joshua ne pouvait pas s’avérer mécontent de sa vie à l’extérieur. Au bout de quelques semaines de cours, il n’était toujours pas sorti de sa phase d’émerveillement. Tout cet espace, toutes ses personnes différentes les unes des autres, toutes ses choses qu’il pouvait apprendre, et ces autres auxquelles il pouvait attacher ces souvenirs qui ne lui appartenaient pas et qui lui paraissaient si familiers.

En sortant des cours, il avait décidé de se rendre à la salle de classe de Deirdre. Il préférait ne pas rentrer seul, car son sens de l’orientation était brouillé par des souvenirs surgissant, et il s’était, en plus de cela, rendu compte que depuis qu’ils étaient à l’université, les Mechanicals Human se voyaient beaucoup moins souvent. Forcément, le temps passé dans la maison de Julian à toutes les heures du jour et de la nuit était révolu, et, sans pour autant le regretter totalement, le fait de moins voir Evan et Deirdre était assez étrange pour Joshua qui était très attaché à eux. Il avait donc quitté les cours une heure avant la jeune femme, mais cela ne l’avait pas empêché d’arriver quelques secondes en retard. Il ne le faisait même pas exprès… Seulement, entre le chemin qui menaient de sa salle de classe à celle de son amie, il s’était laissé guidé par ses pensées, comme souvent.
Au moment où la jeune femme aux cheveux d’or quittait la salle de classe, lui se trouvait au bout du couloir. Il accéléra le pas, son regard, comme toujours perdu ayant pour une fois une idée précise du lieu où il devait se rendre, tandis que sa bouche se fendait d’un sourire agréable. Le jeune homme, lorsqu’il ne paraissait pas égaré, avait au moins l’air heureux. Il ne paraissait pas être blessé par les remarques et les regards d’autrui, comme si ils glissaient sur lui comme sur de la soie.
Il ressentit pourtant un léger pincement au cœur en voyant l’air beaucoup moins ravi de son amie : il était conscient qu’elle était beaucoup plus blessée par les attitudes des autres que lui ne voulait bien le laisser paraître, et ne supportait pas le fait qu’elle paraisse préoccupée.

Son regard, comme toujours, était attiré par tout ce qu’il voyait : les autocollants posés sur les casiers, les murs sales et parfois taggés, les coiffures excentriques de certains élèves, leur manière d’être et de parler… Il se laissait même parfois conduire par certaines flèches placées dans l’établissement, histoire de voir où elles menaient (ce qui expliquait d’ailleurs pourquoi il lui avait fallu une heure pour se rendre à la salle) et s’arrêtait parfois devant des surfaces vitrées pour observer les personnes qui s’y trouvaient. Pourtant, il pressa le pas en voyant que Deirdre paraissait regarder autour d’elle, comme si elle cherchait quelqu’un. Sans doute allait-elle être dessus si elle ne trouvait ni lui ni Evan…

« Salut! »

Son ton joyeux était parfaitement en accord avec son sourire avenant et son regard brillant, alors qu’il paraissait chercher quelque chose dans l’une de ses poches : il en sortit une barre de céréales, qu’il tendit à son amie.
« Tiens, c’est pour que tu reprennes des forces… » Il s’était mis en tête de tester une à une chacune des sucreries que comptait le distributeur

Évidemment, la scène observée d’un point de vue extérieur aurait pu paraître assez amusante, voire même étrange. Joshua avait donnée à Deirdre la barre de céréales sur le même ton protecteur qu’une mère l’aurait fait à son enfant, et ce, comme si il avait été question d’un don beaucoup plus précieux qu’une vulgaire barre de céréales. Mais leur éducation à tous deux n’avait pas vraiment inclus les douceurs chimiques bourrées de conservateurs et de colorants, qui étaient vendues dans le commerce, et avec lesquelles la majorité des jeunes de leur ages avait grandit. Julian était plutôt pour tout ce qui était sain, cuisiné à la maison, et bien qu’ils n’aient jamais étés privés de quoi que ce soit, il fallait avouer que c’était amusant de goûter de nouvelles choses (même si au final, elles n’étaient pas forcément meilleures).
Lors des premiers jours de la rentrée, lorsque Joshua avait découvert l’existence des distributeurs placés astucieusement dans le grand hall de l‘université, entre autres, il s’était amusé à acheter une barre, pour voir, et avait, avant cela, passé quelques minutes à lire tout ce qu’il y avait d’écrit sur l’emballage, du poids au pourcentage de calories à la composition de la dite barre. Il avait déjà observé les publicités télévisées, vantant les mérites de telle ou telle marque, et avait voulu en juger par lui-même. Il avait eu beau creuser dans ses souvenirs, il n’en avait eu aucun lui rappelant avoir déjà goûté ce genre de choses.

Depuis, il lui arrivait d’en prendre de temps en temps, particulièrement lorsqu’il avait envie de se sentir à peu près « normal ».

Il fallu quelques secondes au jeune homme, dont les pensées s’étaient déjà envolées vers d’autres cieux, pour répondre à son amie :

« Oui, c’est assez… Amusant, comme goût ». Amusant était le mot. On ne pouvait pas qualifier les barres de délicieuses, tout comme on ne pouvait pas non plus les qualifier d’insipides. Après tout, elles étaient là pour nourrir des personnes qui avaient sans doute faim, et Joshua n’en aurait pas apporté une a Deirdre si cette dernière n’avait eu aucune chance de les apprécier.
Il haussa les épaules lorsqu’elle lui demanda si il n’avait rien à manger. A vrai dire, durant son épopée à la recherche de la salle de la jeune femme, il était passé devant cinq distributeurs et même une cafétéria. Inutile de dire qu’il avait eu le temps de se sustenter, même si au final il s’était contenté d’avaler le sandwich de son déjeuner et une des dites barres.

« Non, ne t’inquiètes pas, je n’ai pas vraiment… »

Il s’arrêta de parler durant quelques secondes, alors que Lucy Turner traversait le couloir d’une salle à l’autre d’un pas précipité. Puis, se souvenant qu’il était tout de même en pleine conversation, il passa une main gênée dans ses cheveux bruns, et termina :

« …Faim »

Il fallait qu’il cesse de sans cesse penser à la brunette, d’autant plus qu’il ne la connaissait qu’à peine. Cela en devenait envahissant. Serrant un peu plus sa pochette de plastique contre son bras, il ajouta :

« Comment étaient tes cours? »

Puis, voyant que la jeune femme venait de goûter à la fameuse barre, il demanda :

« Alors, tu aimes? »

Amusante était aussi la manière que Dee avait de manger la barre de céréales. Joshua l’observa durant quelques secondes, songeant qu’il avait dû sans doute agir de la même manière lorsqu’il en avait goûtée pour la première fois. C’était assez marrant de faire ce genre d’expériences, il fallait l’avouer, et mis à part les quelques aspects humains qui n’étaient pas tout à fait au point dans sa tentative d’intégration au monde extérieur, Josh comptait ces petits plaisirs sucrés parmi les nombreuses et merveilleuses découvertes qu’il faisait de jours en jours dans le monde extérieur.
Non qu’il n’ai vécu, à l’instar des autres Mechanicals Humans, dans un cocon durant les nombreuses années précédent leur entrée à l’université de Edimburg, mais voir quelque chose à la télévision, sur Internet ou dans les journaux, et le vivre par soi même, étaient des choses totalement différentes.

Lorsque Lucy passa, il avait sentit son cœur faire un bond dans sa poitrine. C’était une sensation très étrange… A chaque fois qu’il la voyait, il avait l’impression que son cœur allait se décrocher littéralement, qu’il était le garçon le plus stupide du monde, et qu’il ne savait rien du tout. Comme tout être humain normalement constitué, (et sans doute un peu plus; étant donné qu’il était loin d’être normalement constitué…) Josh avait à chaque fois l’envie folle d’impressionner Lucy Turner de manière à ce qu’elle voie en lui quelqu’un d’assez intéressant pour être fréquenté, mais à chaque fois, il était arrêté par quelque chose, que ce soit la timidité, ou un manque cuisant d’imagination. Lorsqu’ils s’adressaient la parole, c’était seulement parce que l’un ou l’autre voulait emprunter quelque chose, voire parfois même pour faire passer une feuille à un camarade, et cet état des choses préoccupait assez Joshua qui n’avait réellement aucune idée de la manière dont les choses pourraient évoluer.

Lorsque Deirdre reprit la parole, il la regarda durant quelques secondes, étonné. Lui aussi…quoi? Avait-elle surpris la manière dont il avait observer Lucy, ou parlait-elle d’autre chose? Peut-être avait-il loupé un morceau de phrase, trop occupé qu’il était à observer la brune chevelure traverser d’un bout à l’autre le couloir.

Il leva un sourcil interrogateur, n’osant pas aborder de lui-même, et surtout directement, le sujet qui jusqu’ici n’avait pas dépassé les barrières de sa pensée, avant d’enchaîner sur le sujet suivant. Il ne cachait absolument rien à Deirdre ou à Evan, mais c’était si étrange…

« J’…J’aime beaucoup les cours. C’est amusant d’écouter un prof qui n’a rien de Julian, tu trouves pas? » Il haussa les épaules « Oui… je ne comprend pas, pourtant, on a l’air aussi différents qu’eux, hein? Enfin, j’veux dire qu’ils ont toujours l’air de nous observer alors qu’ils sont eux même étranges » Un nouveau sourire « De toutes manières, je pense que tu t’y feras, Dee. Un jour, tu seras même entourée de toute une foule d’amis! »

Ils firent quelques pas dans le couloir :

« On descend? Tu veux en goûter une autre? Il y a pleiin de saveurs différentes »